Au sein du dispositif optique particulièrement voyeuriste du documentaire animalier, ces plans où l’humain n’y voit plus rien et où d’autres animaux s’activent à luminescer – et donc à apparaître à leur manière – ont de quoi retenir notre attention. Puisque traditionnellement, et ce depuis les premiers grands safaris de chasse filmés, l’animal du documentaire animalier est d’abord un corps-disponible-au-regard (et j’ai envie de dire à l’appétit) humain, un animal qui joue à apparaître et disparaître du champ du visible semble contrevenir aux conditions de possibilités même du dispositif. Certes ces êtres sont saisis dans leurs besognes nocturnes quotidiennes : qui cherche le compagnon ou la compagne, qui cherche le pain, qui cherche à fuir le consommateur, etc. Mais à partir du moment où l’animal n’est plus cette évidence disponible à la vue et à la capture, à partir du moment où cet être se loge à l’interstice de sa visibilité, que devient le dispositif qui le capte ? Dans ce jeu de compagnonages nocturnes, la caméra est-elle une espèce compagne, celle qui partage le pain de lumière, ou au contraire une espèce prédatrice ?
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